Tous ces propos entourant l’arrivée des demandeurs d’asile me bouleversent et me répugnent à la fois.
La bêtise humaine existe de tout temps mais lorsqu’elle est encouragée par certains de nos politiciens cela me révolte d’autant plus.
Ne voient-ils pas les ravages autour de nous de la désinformation et de la peur ?
Ne voient-ils pas les fractures sociales ?
Ne voient-ils pas les paroles et les actes racistes se débrider ?
Ne voient-ils pas les groupes d’extrême droite sortir de l’ombre ?
Mesdames et messieurs au pouvoir, ou souhaitant l’être, jusqu’à quel point êtes vous prêtEs à mettre des vies en danger pour gagner des voix ?
Le témoignage d’une de mes amies sur les réseaux sociaux relatant son parcours de migrante d’il y a quelques années m’a amené à me rappeler qu’en personnifiant un sujet de société on arrive parfois à faire relativiser.
Je vous invite donc, le temps de quelques lignes, à vous mettre dans la peau d’unE migrantE qui quitte le pays où il/elle vit en laissant tous ses biens, tous… Ne prenant dans un sac que quelques affaires, pour les plus chanceuXses qui ne quittent pas dans l’urgence d’une guerre ou d’une catastrophe naturelle.
C’est alors le début d’un périple inconnu qui ne peut s’affronter qu’avec l’espoir de jours meilleurs.
En tenant fermement son enfant par la main, la peur au ventre, on se rassure car on est persuadé qu’on va pouvoir lui offrir des jours plus heureux, une meilleure éducation et tout ce qu’on a peut-être jamais eu.
Puis, on avance sur des chemins inconnus, plus d’eau ni de provisions, on garde le peu que l’on a pour notre enfant en larmes, affamé et épuisé. On avance sous un soleil de plomb, sous une pluie battante, dans la chaleur extrême, par des froids intenses… On avance parce que quelque part, au loin, l’avenir est certainement plus lumineux.
En chemin on perd quelques âmes, on perd parfois un peu la sienne. Pour la première fois on se sent démuni, sans parler de cette peur au ventre qui fait qu’on ne peut fermer l’œil dans les courtes pauses, quand elles sont possibles, pour veiller sur l’enfant endormi.
Puis soudain, au loin, la terre tant attendue… Cette angoisse qui nous consume. Passerons-nous ? Ne passerons-nous pas ? Serons-nous renvoyés au point de départ ?
Enfin une tente, un lit, quelques soins… Mais on le sait, on le sait que ce ne sera que le début d’un nouveau processus.
Puis, dans une attente interminable, on se demandera si on a bien fait, parfois on pleurera la nuit, en secret, mais toujours avec dans le cœur cet espoir de jours meilleurs où nous aurons enfin la sécurité, où nos enfants pourront de nouveau jouer…
Il faudra cependant encore faire face à l’hostilité de l’Humain qui, de son confort, nous en voudra de chercher ce qu’il a déjà : la paix, la sécurité, la dignité. Comment lui faire entendre qu’aucun de ses privilèges ne lui sera retiré ? Comment ?
Les pays et les nations se sont formés de migrations. L’appropriation des terres, la construction de murs et de frontières sont venus compliquer, parfois éteindre, les relations humaines.
Retrouvons cette humanité qui nous habite, passons par dessus les craintes infondées et ouvrons nos cœurs à ces personnes qui, un jour, comme mon amie, seront fières d’apporter leur contribution à ce pays qui sera alors devenu leur mère patrie.
ChèrEs concitoyenNEs, chèrEs représentantEs du peuple, par amour pour notre Québec, je le sais, « oui, ces choses ont déjà été dites mais je les répèterai jusqu’à ce que vous les ayez comprises. » (Gaston Miron, L’homme Rapaillé – 1994)
Eve Torres
Publié sur le site Presse-toi à gauche !