Un reportage édifiant sur le porc allemand
Alors que la viande de porc allemande afflue dans tous les supermarchés d’Europe, les conditions inhumaines dans lesquelles elle est produite restent passées sous silence. Affichant un prix défiant toute concurrence, la réalité derrière cette production phénoménale n’est pas toute rose. Dans un documentaire édifiant, Arte revient sur un business où droits animaux comme humains sont bien souvent mis de côté au profit de la reine rentabilité.
Maltraitance animale ordinaire
Les élevages intensifs ont mauvaise presse ces derniers temps. Alors que les vidéos montrant les conditions d’élevage et d’abattage d’animaux divers (bovins, poules, cochons…) causent de façon régulière l’indignation citoyenne et médiatique (notamment grâce au travail d’associations comme L214), la violence derrière ces images se perpétue chaque seconde. Dans un reportage inédit intitulé « Pauvre cochon, riche affaire », Arte nous dévoile cette fois-ci le business peu reluisant du porc pas cher.
Au programme du reportage, rien de bien nouveau concernant le traitement réservé aux animaux d’élevage. Prenant l’exemple d’un des plus grands élevages d’Allemagne – où 90% du porc transformé est produit par des élevages industriels, le reportage nous montre des porcs et des porcelets entassés dans d’immenses hangars, sans jamais pouvoir voir la lumière du jour. L’animal est réduit à l’état de « chose » pourvoyeuse de ressources. Les truies, quant à elles, sont littéralement encagées au sein de ces hangars géants, et mises à disposition de leurs porcelets afin que ceux-ci puissent téter en continu. Au bout de trois années de ce régime, à raison de trois portées par an issues d’inséminations automatisées, les truies sont épuisées, et envoyées à l’abattoir, sans la moindre pitié.
Le sort réservé aux porcs en devenir n’est guère plus gai : engraissés dès leur naissance au delà du raisonnable, les porcelets sont destinés à l’abattoir dès qu’ils deviennent trop coûteux à nourrir. Leur queue est souvent coupée en prévention, la plupart du temps sans anesthésie. Les problèmes articulaires, les violences entre porcelets due à la promiscuité et les blessures engendrées par leur extrême proximité participent également de conditions de vie désastreuses. Sans compter que pour éviter tout risque de maladies ou d’infections, les éleveurs allemands n’hésitent pas à leur administrer de fortes doses d’antibiotiques, causant par là même une résistance accrue aux bactéries, tant chez le porc que chez l’homme.
L’agressivité de l’industrie allemande
L’Allemagne, qui était auparavant un pays importateur de cochon, s’est affirmée comme une terre exportatrice forte en quelques années à peine. Chaque année, ce sont pas moins de 60 millions de cochons qui sont tués pour la consommation sur le territoire allemand, soit deux fois plus qu’en France. Et si un tel revirement de la balance des paiements a pu s’opérer, c’est en grande partie grâce aux politiques d’encouragement à la production de masse porcine instaurées par l’Allemagne. Un modèle déshumanisé souvent porté en modèle par les politiques et les médias au nom du culte de la croissance. Les éleveurs porcins allemands sont en effet fortement subventionnés pour pouvoir moderniser et « industrialiser » leur production. Conséquence : les élevages intensifs se multiplient, les économies d’échelle fleurissent, la production s’automatise, les petites productions disparaissent… et la nature trinque.
En France, de l’autre côté de la frontière, ce sont en contrepartie une vingtaine d’élevages porcins qui mettent clé sous la porte tous les mois. En cause, d’après les fermiers, des règles environnementales qui désavantagent les producteurs français, et des frais d’abattages plus élevés. En effet, les lisiers issus de ces élevages connaissent des règles d’épandage différentes d’un pays à l’autre. Polluants, ils sont responsables de l’appauvrissement des terres et de la contamination en nitrates des nappes phréatiques. Conséquence : le porc allemand coûte moins cher par externalisation (faire porter un coût négatif sur l’environnement), et une fois sur les étales, le consommateur a vite fait de le choisir au détriment de son concurrent hexagonal plus cher.
En outre, le reportage revient sur la pratique d’un dumping social et salarial au sein des exploitations allemandes. Des employés des pays de l’est, attirés par les salaires allemands, se laissent embarquer par des abattoirs qui finiront par les exploiter. Là encore, la législation allemande connaît une faille sociale qui coûte cher à beaucoup de personnes. Face à ces constats alarmants, les associations appellent à prendre un tournant décisif dans les politiques agricoles. Le modèle suédois, qui met la santé de l’animal au centre des préoccupations de l’éleveur au travers d’une législation stricte, semble être une bonne piste pour les élevages européens. Afin que non seulement l’animal, mais aussi les droits et la santé des humains puissent être respectés, alors que la situation actuelle ne semble privilégier qu’une poignée d’acteurs bien particuliers…
**************** ***********
Le marché impitoyable de la viande
Comme pratiquement aucun autre, le marché de la viande enchaîne les scandales. Comment est-il possible que, régulièrement, de la viande avariée se retrouve sur les étals ? Que plusieurs tonnes de viande de cheval atterrissent dans des lasagnes sans qu’inspecteurs et producteurs ne s’en aperçoivent ? Malheureux concours de circonstances ou négligence caractérisée ? En fait, la réponse est ailleurs. Derrière ces « erreurs » se cache tout un système. C’est ce que dévoile une enquête réalisée dans toute l’Europe. Objectif : découvrir ce qu’il y a derrière ces noms bucoliques qui évoquent des fermes traditionnelles ou des boucheries artisanales. La réalité est peu ragoûtante… La viande est un marché impitoyable. Les profits se chiffrent en milliards. Certes, les consommateurs veulent payer le moins possible, mais pas au détriment de la transparence et de la qualité. Or, le système qu’éleveurs, grands groupes et industrie agroalimentaire ont mis en place, avec le soutien des responsables politiques, rend toute traçabilité impossible. Selon eux, c’est la seule réponse possible face à la forte demande de produits à bas prix : d’après le « Fleischatlas » (atlas de la viande) publié par la Fondation Heinrich-Böll et le BUND (les Amis de la Terre Allemagne), un Européen consomme 66 kilos de viande par an. Au cours de sa vie, un Allemand mange en moyenne 1 094 animaux, soit quatre bœufs, quatre moutons, 12 oies, 37 canards, 45 dindes, 46 porcs et 945 poulets !
Pour lire l’article complet qui date de février 2016 :
http://future.arte.tv/fr/le-marche-impitoyable-de-la-viande