Une très bonne analyse (comme souvent) de Samuel Gontier dans télérama.
Avant de lire l’article de Télérama, lisez celui de certain.es habitant.es de la ZAD :
Tapis dans le bocage : la vérité sur les armes secrètes des « zadistes »
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Une personne de l’acrimed (institut d’étude critique des médias) nous livre une analyse drôle et bien sentie de la fable qui s’est racontée tout au long de la semaine dans certains médias et dans la bouche d’un certain nombre de dirigeants et analystes, en vue de justifier une éventuelle criminalisation féroce de la zad. Il y en a qui ne supportent toujours pas que, depuis des années, des personnes s’organisent à contre-courant de leurs valeurs mortifères et qui tentent toujours les mêmes stratégies de division des mouvements…
Pour lire le document complet :
telerama.fr/television/a-notre-dame-des-landes,-le-vietnam-des-pauvres-menace-la-france-dune-guerilla,n5402676.php
Extraits
A Notre-Dame-des-Landes, “le Vietnam des pauvres” menace la France d’une “guérilla”.
La République en danger ! Le rapport remis au gouvernement laissant en suspens le choix de construire un aéroport, les experts télévisés ont insisté sur l’indispensable évacuation de la ZAD.
Une zone de non-droit, une contre-société peuplée d’utopistes idéologues qui préparent des combats ultraviolents en amassant des armes non conventionnelles.
« La ZAD de Notre-Dame-des-Landes sera évacuée fin janvier, quelle que soit la décision prise sur l’aéroport », annonce Anne-Sophie Lapix en ouverture du 20 heures de France 2. « Les experts ne tranchent pas vraiment mais ils préconisent le rétablissement de l’Etat de droit et donc l’évacuation des zadistes dans les prochaines semaines », prévient Gilles Bouleau au même moment sur TF1. « Nouvel aéroport ou pas, la ZAD sera évacuée, ça me semble une évidence », juge Yves Calvi dans 20h00, l’événement, sur Canal+. Mercredi, au soir de la remise au gouvernement du rapport sur l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes, l’enjeu écologique a disparu au profit du « retour de l’Etat de droit » préconisé par le rapport.
« Pour les experts, une chose est sûre : il faut évacuer la ZAD au plus vite », répète Gilles Bouleau en développant ses titres. « Que va faire Emmanuel Macron ? », demande-t-il au chef du service politique de TF1.
Là, surprise, Christophe Jakubyszyn répond : « Je peux déjà vous annoncer une décision certaine, c’est l’évacuation de la ZAD, occupée illégalement par des dizaines de protestataires depuis des années. » Des protestataires illégaux, ça fait deux raisons de les expulser. « C’est la décision la plus délicate politiquement parce que c’est la plus risquée. » A côté, la décision de construire (ou pas) l’aéroport en devient anodine.
« Il faudra mobiliser des centaines de policiers et il y a des risques d’affrontements très violents. Mais il en va de l’autorité du chef de l’Etat de supprimer une zone de non-droit qui défie la République depuis des années. » La République est en danger ! « Il y a une république qui est née au cœur de la France, qui s’appelle la ZAD, qui vit selon ses coutumes, avec des lois qui sont pas forcément les nôtres et qui vit très bien comme ça et qui peut pas être délogée », se désole Yves Calvi sur Canal+. « Les forces de l’ordre craignent une réplique ultra-violente des zadistes, révèle Anne-Sophie Lapix sur France 2. Ils les disent armés de boules de pétanque hérissées de clous, de piques et de herses. »
« Ceux qui occupent de façon quasi militaire le site se préparent au combat », assure Christophe Castaner en ouverture du reportage sur la prolifération des armes de destruction massives à Notre-Dame-des-Landes. « La ZAD est occupée par deux cents à trois cents personnes en état de siège permanent », confirme un reportage de BFMTV filmant en contre-plongée un talus hérissé de pieux meurtriers… A moins qu’il ne s’agisse de « clous géants »…
« Depuis quelques jours, explique la reporter de France 2, dans les journaux, certains gendarmes anonymes décrivent tout un arsenal chez les zadistes les plus déterminés. » En fait de « journaux », seul un article du JDD est montré sous ses différentes formes (en ligne et sur papier).
« Une note interne évoque des stocks d’engins incendiaires, des pièges dans les bois et même la présence d’armes à feu. » Sans parler des missiles longue portée fournis par la Corée du Nord. « Dans les états-majors, les militaires parlent de herses plantées de clous géants, de boules de pétanques hérissées de lames de rasoir. » Euh… attendez, tout à l’heure, les boules de pétanques étaient hérissées de clous, maintenant, elles sont hérissées de lames de rasoir… Il faudrait savoir.
« Un haut gradé résume : “Ils nous attendent, ils se préparent à l’affrontement et on peut craindre des morts.” » Victimes des clous géants hérissés de lames de rasoir. « Pour les gendarmes, précise la journaliste, insister sur les armes qui seraient détenues par les zadistes serait un moyen de s’adresser à leur hiérarchie militaire pour obtenir le maximum de moyens. » Ah bon ? Mais alors, la mention de tous ces clous hérissés de boules de pétanque n’est peut-être qu’une intoxication… Sur Canal+, un politologue à l’université de Nantes, Goulven Boudic, fait aussi remarquer que la nécessité de « vider la ZAD » est une « figure imposée » de tout rapport sur Notre-Dame-de-Landes. Du coup, cela devient la figure imposée des débats d’experts.
« Ils ont piégé cette zone de 1 200 hectares, lit-on ces derniers jours », rapporte Caroline Roux, animatrice de C dans l’air, sur France 5 et elle aussi lectrice du JDD. Pour Christophe Barbier, « les lois françaises sont piétinées par le haut, par les Gafa qui ne paient pas d’impôts, et piétinées par le bas par des zadistes qui n’ont aucune légitimité ». Et qui sait si les zadistes ne placent pas leurs économies dans les paradis fiscaux ?
« Les militants idéologues disent : “On occupe le terrain, on est plus légitime que la démocratie représentative” », rappelle Christophe Barbier, lui-même vierge de toute idéologie. « C’est à ça que Macron doit répondre, il doit montrer que la démocratie représentative peut encore fonctionner tout en n’envoyant pas des policiers, des CRS, des soldats au risque d’avoir des morts. » Par exemple, des morts par balle de ping-pong hérissées de hallebardes. « Parce que l’opinion ne supporte plus les remises en ordre violentes devant les caméras de télévision.» Il faudrait interdire les caméras pour pouvoir remettre en ordre les militants idéologues en toute tranquillité.
« C’est indispensable [d’évacuer la ZAD], agrée Ghislaine Ottenheimer, journaliste de l’écurie Renault-Challenges, invitée d’Yves Calvi sur Canal+. Parce que sinon il y a énormément de ZAD en puissance (sic) ou déjà existantes comme à Bure, ça veut dire qu’il n’y a plus la possibilité de faire la moindre bretelle d’autoroute, le moindre aménagement. » Et il en faut, des bretelles d’autoroutes, pour faire rouler des Renault.
« Macron en a pris l’engagement, rappelle l’éditorialiste. Cazeneuve a dit dans son livre que c’était impossible parce qu’on ne pouvait pas avoir en même temps l’opération Sentinelle, les interventions au Mali, etc. » « Bernard Cazeneuve estime qu’il faut un tiers des forces mobiles du pays pour intervenir, confirme Caroline Roux sur France 5. Ça paraît énorme. » Il faudrait peut-être faire appel à l’Otan.
Sur LCI, David Pujadas reçoit un expert des plus objectifs. « Il y a un autre aspect, Jean-Marc Ayrault, c’est l’occupation de la ZAD. Vous, Premier ministre, vous avez tenté de les déloger, c’était en 2012, et puis vous avez reculé. Alors comment exiger d’un gouvernement qu’il mène une action d’évacuation alors que vous-même avez choisi de reculer ?» « J’ai demandé à ce qu’on suspende cette intervention parce que tous les moyens nécessaires n’avaient pas été mis. » Les chars Leclerc, les Rafale et les hélicoptères de combat n’avaient pas été engagés.
Chaque chaîne ressort les apocalyptiques images de « l’opération César, la première tentative d’évacuation » et ses « scènes de guérilla» soldées par « de nombreux blessés et un échec »…
Chacune fait référence aux « affrontements du barrage de Sivens. Les forces de l’ordre s’étaient heurtées à des manifestants, rappelle France 2. L’un d’entre eux avait trouvé la mort ». Il avait surtout trouvé une grenade offensive lancée par un gendarme mobile… Mais cette précision n’est jamais mentionnée sur aucune chaîne. Sur France 2, Rémi Fraisse s’est « heurté » un peu trop durement aux forces de l’ordre, sur France 5 il semble avoir été victime d’un « syndrome » ou d’un « traumatisme » : « Le syndrome Rémi Fraisse est omniprésent », « le traumatisme de l’évacuation de la ZAD de Sivens qui avait coûté la vie à Rémi Fraisse reste dans toutes les têtes ».
Des reportages montrent une « détermination sans faille chez tous les habitants de la ZAD » (France 2). « Les occupants ont tout prévu, y compris les renforts. En cas d’intervention, il y a des dizaines de milliers de personnes qui viendraient défendre la ZAD », rapporte BFMTV, montrant de dos un zadiste hérissé d’un sarcloir, d’une binette et d’une fourche. Le reportage de C dans l’air à Notre-Dame-des-Landes se termine par de terribles images de vitrines brisées à Nantes, « un saccage que les habitants n’ont toujours pas digéré ». « Quelle que soit la décision, confirme une habitante, moi je veux que la ZAD soit expulsée. »
Le reportage de BFMTV s’achève lui dans l’atelier d’un Camille. Ce zadiste a produit cinq tonnes de « farine de lutte », une redoutable munition qui, mélangée à des œufs hérissés de clous géants et projetée sur les forces de l’ordre au moyen de catapultes, pourrait causer des dizaines de morts.
Au fait, qui sont ces zadistes ? « C’est ce qu’on appelle des squatteurs dans un langage fleuri », révèle Yves dans un langage Calvi. Caroline Roux interroge : « De quoi vivent ces gens ? Qui font des enfants, hein, quinze enfants sont nés sur la ZAD. » Parce qu’en plus, ils se reproduisent ? « Installés depuis des années, beaucoup ont eu le temps de construire un monde à eux, un monde à part », explique TF1. Je suis sûr qu’ils n’ont même pas pleuré Johnny Hallyday. « Une véritable contre-société », selon l’historien Jean Garrigues sur France 5, composée par de « lointains héritiers de Cabet et de Fourier, ils vivent en communauté, ils produisent ». « Il y a plusieurs micro-sociétés : quelques agriculteurs, les idéologues, les excités… », détaille un autre invité dépourvu de toute idéologie, Arnaud Gossement, avocat spécialisé dans le droit de l’environnement.
« Ils sont très amusants, juge Ghislaine Ottenheimer sur Canal+. Ils sont sympathiques, hein, il faut dire. Ils sont plein d’idéal, ils sont assez sympathiques quand on les voit comme ça individuellement, ils sont assez amusants. » Très drôles, en fait. « Ils ont dit : “Oui, on veut bien négocier, on pourrait peut-être juste louer un peu le terrain, on pourrait nous faire un prix.” Ah ah, ils sont assez amusants, hein ?!» Désopilants.
Folkloriques, renchérit Christophe Barbier. « On nous montre là [dans le reportage qui s’achève sur le terrible “saccage” nantais, ndlr] l’aspect sympathique et folklorique de quelques Robinson Crusoé qui vantent le retour à la terre et la vie en phalanstère. » Quelle bande de rigolos !
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