Tiens, tiens, le revoilà.
Alors que l’on pensait la question réglée, un vieux serpent de mer politique ressurgit à la faveur du « Grand débat national » : le cumul des mandats. En évoquant, lors d’une réunion publique dans l’Eure, une possible remise en cause de la règle adoptée en 2014 (pas de cumul entre un mandat de parlementaire et un mandat exécutif local), Emmanuel Macron a entrouvert la porte. Qu’ont poussé Édouard Philippe et Marc Fesneau, le ministre des relations avec le Parlement, avant que ne s’y engouffrent les opposants “historiques“, brandissant les sempiternels arguments de la « déconnexion » des parlementaires ou de leur « manque d’ancrage territorial ».
Qu’aurait changé à la crise actuelle le fait que certains députés et sénateurs soient aussi maires d’une commune ou président un conseil général ? L’auraient-ils mieux senti monter ? On peut en douter. Comme l’ont montré nos enquêtes, Gérald Darmanin a cumulé jusque récemment son poste de ministre avec des mandats de maire-adjoint de Tourcoing, de vice-président de la Métropole lilloise et de conseiller régional des Hauts-de-France, sans tirer le signal d’alarme… Deux ans après son entrée en vigueur, on peut trouver paradoxal de remettre en cause une mesure qui semble commencer à porter certains fruits : spécialiste du contrôle du travail parlementaire, le collectif Regards Citoyens a récemment calculé que, sans cumul, la présence des députés en commission a augmenté de 29%…
D’autant plus paradoxal que lors de sa campagne, Emmanuel Macron avait justement promis d’aller plus loin en limitant le cumul dans le temps. Et en la matière, nos différentes enquêtes sur les « dinosaures de la politique » ont démontré qu’un sacré travail reste à mener. Empêcher que des élus, bien assis dans leur baronnies, puissent totaliser, tout confondu, jusqu’à 120 années de mandat… voilà, sans doute, qui permettrait d’assurer plus sûrement le renouvellement du discours. Et d’éviter la « déconnexion ».
– Benjamin Peyrel, Journaliste, co-fondateur de Mediacités