J’accuse les hautes sphères politiques et médiatiques pour leur manipulation et leur trahison de la juste lutte contre l’antisémitisme.
J’accuse les pouvoirs politiques et médiatiques d’avoir construit de toute pièce l’accusation d’antisémitisme contre les Gilets Jaunes, contre le peuple rebelle.
J’accuse les principales autorités juives de pervertir la lutte contre l’antisémitisme par sa mise au service de visées politiciennes.
Le coeur me déchire de devoir formuler si graves accusations mais aujourd’hui, comme du temps de Zola, un travestissement des faits à caractère racial est commis à seule fin de protéger le pouvoir. Le coeur me déchire parce qu’étant juif ce à quoi j’assiste m’est plus blessant encore que les plus abjectes campagnes antisémites : cette manoeuvre contre le peuple trouve soutien et complicité dans les plus hautes autorités juives censées me représenter.
Au coeur des faits réels qui ont donné lieu à travestissements figurent trois événements.
Le premier, pas nécessairement par ordre chronologique, est constitué par trois actes antisémites concomitants. Les croix gammées sur les portraits de Simone Veil, la destruction des arbres souvenir d’Ilan Alimi, l’inscription « Juden » sur la devanture d’un magasin dont le propriétaire est juif. A ce jour nul ne sait quels sont les auteurs de ces actes odieux. A ce jour, nul ne peut être désigné coupable de ces gestes ignobles. A ce jour, nul individu, nul groupe ne peut être jeté à la vindicte. J’attends avec impatience que ceux ci soient identifiés afin qu’ils soient condamnés, mais encore plus parce que je voudrais être certain que ces gestes infâmes ne sont pas le fruit d’un de ces groupuscules extrémistes qui infestent la communauté juive. Chacun a ses hypothèses, pour les uns l’origine vient des Gilets Jaunes, pour moi il faudrait regarder du côté des Ldj et Bétar, peut être l’enquête aboutira-t-elle sur quelqu’autres imbéciles qui dans tous les cas de figure ne représenteront qu’eux même. Ces trois faits, aussi graves soient-ils, ne peuvent, ne doivent donner lieu au lynchage médiatique d’un mouvement populaire. Pervertir le combat contre l’antisémitisme ne peut que conduire à nourrir le racisme bien plus puissamment que les fanatiques de sale obédience.
Le second événement concerne monsieur Finkelkraut. Je tiens ce personnage pour abject, pour un infâme raciste qui mérite amplement la réprobation populaire qu’il peut rencontrer. La réprobation sans coup, sans racisme, simplement l’expression du dégout que ce sale type inspire. Si une personne profère à son encontre des propos racistes, qu’elle soit justement condamnée. Quel dommage qu’il n’en ait pas été de même lors des éructations islamophobes de l’académicien. Le combat anti raciste en aurait été renforcé.
Le troisième événement concerne une dizaine de poivrots exhibant la quenelle lancée par l’antisémite Dieudonné. Cet acte d’une poignée de crétins a donné lieu à d’amples indignations jusqu’au plus haut de l’Etat. Quel dommage que cette indignation face à des ivrognes n’ait pas eu son pendant à juste dimension lorsque les auteurs de faits indignes ont été, dans la même semaine, un Maire et une Sénatrice chassant d’un marché municipal une femme pour port d’un signe religieux (islamique il est vrai, donc racisme acceptable). Cet usage politicien du nécessaire combat anti raciste est le pire ennemi de ceux qui aspirent à une bonne entente.
Rien ne justifie d’induire de ces trois faits réels une mise en procès de quelque groupe que ce soit. Rien en l’état ne justifie de porter sur le moment à l’indignation nationale la dénonciation de l’antisémitisme, si ce n’est un bas calcul politicien qui n’a rien à voir avec l’antiracisme.
Juif je suis, et Gilet Jaune. Ce que je vois dans Peuple vêtu de jaune est beau, est digne. Ces gens que j’ai le bonheur de croiser lèvent la tête, ont de l’éclat dans les yeux et ils parlent, et ils réfléchissent. Des juifs, je n’ai jamais entendu parlé sur les ronds points, dans les réunions, ce n’est pas le sujet. Quelques fois sur Facebook surgissent des publications sur le sujet, étonnantes, portées par deux ou trois individus de passage jamais vus avant, jamais vus après. J’ai dénoncé ces publications racistes. La tendance est plutôt « on forme une famille » et les sujets sont le RIC, rend l’ISF, Macron démission, les médias devenus officines de propagande et les blessés, les blessés, les blessés…
J’éprouve une profonde admiration pour ces gens au quotidien si difficile qui soudain reprennent espoir. Il est des jours magiques et plein de soleil lorsque le peuple dit stop, déchire le silence, pulvérise l’oppressive fatalité. Ma famille Gilets Jaunes, je vous admire. Alors oui, je sais, avec une famille si nombreuse, couvrant tout un peuple, il y a fatalement parmi nous quelques voleurs, quelques brutes familiales, quelques pédophiles, quelques racistes, quelques antisémites… Enfin, toutes les déviances humaines existantes ne peuvent qu’être représentées dans un si grand nombre. Moi, je ne veux voir que le beau de cette révolte parce que le laid existait avant, bien avant et que seule la révolte est nouvelle. Parce que seule cette révolte de dignité peut faire, un peu, refluer le laid par la dimension humaine qu’elle porte. Tous les engagements du peuple sont confrontés à ce même dilemme, la Résistance, la Commune de Paris. A chaque fois, ceux du Peuple ou proches du Peuple (Victor Hugo !) y voient la grandeur, ceux du pouvoir, ceux de la haute, y cherchent les vilénies pour déverser leurs bassesses sur ceux d’en bas. Voilà ce que nous vivons une fois de plus. Rien de plus.
Viles prétentieux du pouvoir, je vous accuse de turpitude, de jeter de l’huile sur le feu du racisme. L’antisémitisme n’est pas un pion à jouer dans votre combat de domination. Vous n’avez rien appris de l’histoire !
Serge Grossvak ; Juif Autrement Yid
Entreleslignesentrelesmots.blog
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Du bon usage de l’antisémitisme en politique
Il y aurait une certaine incongruité à vouloir légiférer sur l’antisionisme, alors et surtout que personne ne songe à incriminer ceux et celles, en Israël comme en France, y compris dans la représentation nationale, qui contestent le droit des Palestiniens à avoir leur Etat, voire vont jusqu’à nier leur existence !
Bien sûr que les insultes essuyées par Alain Finkielkraut relèvent d’une parole antisémite déguisée. A l’évidence, le mot sionisme n’est ici que le cache sexe de l’antisémitisme. Et rien ne peut relativiser cette réalité. Même pas l’ire réactionnaire d’un académicien qui rêve d’un pays fantasmé et propriété des élites, surtout pas le double discours d’un opposant à la colonisation et au gouvernement actuel d’Israël dont la voix ne se fait entendre que lorsqu’il s’agit de défendre Israël, pas plus lorsqu’il s’agit de pointer les incohérences énervées d’un intellectuel qui en 2002 évoquait le souvenir de « la nuit de Cristal » à propos des actes antisémites en France ou, en 2005, à propos de la révolte des banlieues, les « pogroms antirépublicains », pour finir par exprimer sa peur de « l’immigration de peuplement » et du « grand remplacement ».
Qu’Alain Finkielkraut attire et attise la haine ne saurait justifier ni cette haine, ni sa nature raciste et antisémite. C’est la raison pour laquelle, avant de prendre en considération ce qui peut déplaire dans le personnage, les insultes qu’il a supportées impliquent une condamnation sans réserve car, au-delà de l’individu qu’elles atteignent, il s’agit là d’une agression contre le fondement de tout contrat social.
Est-ce une raison pour faire de ceux et celles qui se proclament antisionistes des délinquants ? C’est pourtant ce que souhaitent, paraît-il, une trentaine de députés se sentant, sans doute, soutenus par un président de la République qui a cru bon d’abonder en ce sens et d’introniser Benjamin Netanyahou comme représentant des juifs du monde entier.
Il est vrai que la Cour de cassation a déjà cru bon d’assimiler l’appel au boycott des produits israéliens à une manifestation d’antisémitisme. On attend avec impatience ce que dira la Cour européenne des droits de l’Homme d’une interprétation si extensive du droit pénal français et si restrictive de la liberté d’expression.
Je ne suis pas de ceux et celles qui délégitiment l’existence de l’Etat d’Israël. On peut gloser à l’infini sur les raisons qui ont amené à sa création, sur la catastrophe qu’a représentée cette création pour les habitants chrétiens et musulmans de la Palestine (sauf à nier l’évidence…), etc. Le débat historique n’a d’intérêt qu’en ce qu’il redresse certains mythes (les Palestiniens n’existent pas et sont partis d’eux-mêmes, il n’y avait pas de juifs en Palestine, par exemple) mais il ne résout en rien la contradiction qui perdure depuis plus de 100 ans et qui s’exprime aujourd’hui autour d’une réalité simple et cruelle : une nation occupante d’une nation occupée et colonisée.
C’est pourquoi, j’ai du mal à m’identifier à un débat qui mêlerait anti ou pro sioniste et pro ou anti Palestinien. La seule question qui vaille c’est celle du droit, du droit d’Israël à exister et du droit du peuple palestinien à avoir son Etat. Or, à ce jour, c’est bien la deuxième partie de la proposition qui est niée : ce n’est pas l’existence d’Israël qui est menacée par les Palestiniens, c’est le droit des palestiniens à exister qui leur est refusé par une puissance occupante qui bénéficie d’appuis qui vont de la caution active, j’évoque ici les USA, à une lâche complicité, j’évoque ici l’Union européenne, y compris la France.
Il y aurait donc une certaine incongruité à vouloir légiférer à ce propos alors et surtout que personne ne songe à incriminer ceux et celles, en Israël comme en France, y compris dans la représentation nationale, qui contestent le droit des Palestiniens à avoir leur Etat voire vont jusqu’à nier leur existence !
Renvoyer le débat politique au juge, en deçà des limites qui mettent en cause les principes essentiels, n’a jamais rien produit d’autres qu’une restriction aux règles démocratiques au mieux et une radicalisation mortifère au pire.
Déjà injustifiable, cette criminalisation du débat autour d’Israël et du sionisme est totalement contreproductive au regard des objectifs que lui assignent ses soutiens.
Dire que l’antisionisme ne recouvre pas, chez certains, une manifestation d’antisémitisme serait scandaleusement stupide. La défense des droits des Palestiniens a servi de cache-sexe à bien des pouvoirs et à bien des manipulations. Des régimes arabes qui mobilisent les foules sur ce thème pour éviter qu’elles se préoccupent de leur propre sort, aux pseudos idéologues en même temps qu’antisémites avérés comme Soral et consorts, les Palestiniens ont subi plus qu’à raison cette instrumentalisation. Qu’il faille lutter contre cela, nul n’en disconvient et le code pénal contient suffisamment de dispositions pour condamner quiconque s’aventure sur ce terrain.
Aller au-delà ne permettra que d’interdire toute critique de la politique des gouvernements israéliens.
C’est bien l’objectif recherché dans la tentative de l’IHRA (1)de faire adopter une définition normative de l’antisémitisme. Outre la pauvreté intellectuelle que recèle le texte proposé, ce sont les exemples, en particulier l’un d’entre eux, qui éclairent l’assimilation des critiques que supportent la politique israélienne à de l’antisémitisme. Cette proposition de définition est, en effet, assortie d’exemples de manifestations d’antisémitisme dont celle-ci : « Appliquer deux poids, deux mesures en imposant à celui-ci [l’Etat d’Israël] un comportement non attendu ni exigé de la part d’un autre pays démocratique. »
On ne peut dire plus clairement que ce qui est ainsi recherché c’est l’absolution et l’impunité de la politique israélienne.
Cette tentative, soutenue par le ban et l’arrière-ban des organisations communautaires juives, comme la volonté de criminaliser le discours antisioniste, ne serviront nullement à combattre l’antisémitisme mais, tout au contraire, à le renforcer. En assimilant une manifestation de racisme intolérable à une critique fût-elle radicale, d’Israël et de sa politique, ce sont tous les juifs qu’on assimile ainsi aux errements de celle-ci et, particulièrement, à ce qu’elle conduit à faire subir au peuple palestinien.
Si l’on voulait tirer un trait d’union entre juifs français ou d’autre nationalités et le discours raciste et les pratiques déshumanisantes des autorités israéliennes, on ne s’y prendrait pas autrement.
C’est le chemin que s’apprêtent à emprunter ceux et celles qui caressent l’idée d’introduire la dimension de l’antisémitisme dans la critique des gouvernements israéliens.
C’est le chemin qu’a déjà emprunté le président de la République en invitant Benjamin Netanyahou à la cérémonie du Vel d’Hiv et en y recourant à ce même syllogisme.
Lequel Netanyahou s’est empressé de remercier Emmanuel Macron en réunissant à Jérusalem ce quarteron de gouvernements autoritaires et plus ou moins antisémites du groupe de Visegrad.
Non, critiquer la politique israélienne, réclamer l’application de sanctions devant le refus permanent des autorités israéliennes de respecter le droit international, exiger que les produits israéliens qui arrivent sur nos tables et dans nos magasins ne soient pas issus des colonies, tenter de faire juger les généraux israéliens coupables de crimes de guerre, dénoncer la discrimination dont sont victimes les hommes et femmes d’Israël qui ne sont pas juifs, tout cela n’a rien à voir avec l’antisémitisme.
Cela concerne l’idée qu’il n’y a qu’une seule humanité soumise aux mêmes règles.
[1] https://www.holocaustremembrance.com/
Sur le le blog mediapart de Michel Tubiana, président d’honneur de la LDH