Il a fait 38 °C samedi 20 juin à Verkhoïansk, en Sibérie orientale.
Du jamais vu en juin dans cette station météo connue pour être la plus froide de l’hémisphère nord. Un record qui vient sur fond de rapports alarmants sur le dérèglement climatique qui s’accélère dans les régions Arctique. Est-il déjà trop tard ?
38 degrés ont été enregistrés à Verkhoïansk, en Sibérie. Il n’avait jamais fait aussi chaud au-delà du cercle polaire arctique. La nouvelle a suscité l’émoi des climatologues, notamment sur les réseaux sociaux. Selon un relevé préliminaire, 38°C ont été mesurés samedi à Verkhoïansk, en Sibérie. Si ce chiffre devait être confirmé, il représenterait le record de température si loin au nord du cercle polaire. Parmi les scientifiques diffusant l’information, Mika Rantanen de l’Institut météorologique finnois, a été retweeté par l’activiste Greta Thunberg. « Verkhoïansk, une ville russe dans l’Est de la Sibérie connue pour ses hivers exceptionnellement froids, vient de battre son record historique de chaleur avec un écrasant 38°C! Les données sont conservées depuis 1885 », a écrit le chercheur sur Twitter.
« Si cette valeur est correcte, ce serait non seulement un record absolu à la station (37,3°C, 25/07/1988) mais aussi la température la plus élevée jamais observée au nord du cercle polaire arctique ! », a tweeté le prévisionniste de Météo France Etienne Kapikian.
Dans un message publié sur Twitter, le secrétariat de l’ONU Changements climatiques s’inquiète d’un réchauffement climatique qui s’accélère encore plus vite que la moyenne en Sibérie. « Les températures du mois de mai en Sibérie étaient jusqu’à 10°C au-dessus de la moyenne à partir de laquelle le Permafrost commence à fondre », alerte l’organisation.
Prévisions alarmistes
Ce record de chaleur confirme les prévisions les plus alarmistes décrites dans un rapport de l’ONU publié il y a plus d’un an, en mars 2019. Bourré de cartes et de chiffres il nous montrait que la situation de l’Arctique a atteint un stade d’irréversibilité. Les enregistreurs de températures ne cessent de s’affoler et établissent des prévisions sur lesquelles personne n’aurait osé parier : 3 à 5° d’augmentation d’ici 2050 et 5 à 9° d’ici 2080.
Les scientifiques sont formels : la banquise arctique a fondu de 40 % depuis 1979. À ce rythme, la glace pourrait avoir disparu, en été, en Arctique, dès les années 2030. Cette fonte est si importante qu’elle représenterait, à elle seule une part importante (30 %) de l’élévation du niveau des océans, à l’échelle mondiale.
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Le drame, c’est qu’il n’y a déjà plus rien à faire pour enrayer cette issue. Même si tous les États du monde étaient pris, tout d’un coup, d’un grand sens de leurs responsabilités et se mettaient à respecter les termes de l’Accord de Paris, cela ne suffirait pas. C’est l’une des conclusions les plus fortes du rapport de l’ONU.
Ce qui se passe en Arctique ne reste pas en Arctique
Le problème, c’est que la fonte de l’Arctique ne concerne pas que le Grand Nord. « Ce qui se passe en Arctique ne reste pas en Arctique », avait prévenu Joyce Msuya, coéditrice du rapport, à l’occasion de la présentation de ce document. Elle impacte, en cascade, l’ensemble de la planète. Parmi les conséquences attendues, la fonte du permafrost est l’une des plus dangereuses. En effet, en fondant, ce sol gelé va libérer des quantités astronomiques de gaz à effet de serre supplémentaires. Un carburant qui va pousser les moteurs de la machine climatique au-delà du rouge. Or c’est exactement ce que craignent les climatologues : c’est le phénomène d’emballement. Car à ce stade, plus rien n’est ni contrôlable, ni prévisible.
Cet emballement climatique va toucher tout ce qui vit. Les populations locales seront les premières affectées, mais aussi la faune et la flore qui n’en sortiront pas indemnes. Si à cela on ajoute les émissions polluantes, les métaux lourds, les microplastiques, les conflits territoriaux, l’invasion de nouveaux virus, etc. le scénario dont le point de départ se dessine au Pôle n’est pas celui d’une comédie légère.
Faut-il céder au fatalisme ?
Faut-il pour autant se laisser aller au fatalisme et à la démobilisation ? Les rapporteurs de l’ONU plaident pour que les objectifs de l’Accord de Paris soient respectés au plus vite. « L’urgence de réaliser les objectifs de l’accord de Paris se manifeste clairement dans l’Arctique, car il s’agit d’une des régions les plus vulnérables et les plus en mutation du monde », alerte, en écho, le ministre finlandais de l’environnement, Kimmo Tiilikainen. « Nous devons considérablement réduire à court terme les émissions de gaz à effet … dans le monde entier ».
Pour y parvenir, les recettes sont connues : énergies renouvelables ; réduction des émissions ; infrastructures durables ; agriculture durable et gestion durable des forêts et des océans ; moyens de résister aux effets des changements climatiques ; investissement dans l’économie verte, etc. Des solutions dont l’ambition doit se situer à la hauteur des enjeux. Les opinions publiques du monde entier se rendent compte de la gravité de la situation. Mais alors qu’au niveau individuel, nombreux sont ceux qui ont décidé de changer de comportements, les gouvernements, à peu près partout sur le globe, temporisent, contournent, chipotent, papotent, hésitent, mais ne prennent aucune mesure à la hauteur de la situation. Nous avons vu avec la crise du coronavirus le niveau d’impréparation de la plupart des gouvernements ; en tireront-ils une leçon pour affronter la crise climatique ?
« Dans l’immédiat, il est évident qu’il ne serait pas prudent de compter sur les seuls gouvernements pour accélérer le mouvement. » écrivait dans une tribune le politologue néo-zélandais, professeur à IEA de Nantes, Adrian Macey. Mais, selon lui, il ne faut pas sombrer dans le désespoir car il existe quelques lueurs dans ce tableau très sombre.
Lueurs d’espoir
Un espoir que l’on trouve en regardant ailleurs que dans le pré carré des gouvernants. L’économie mondiale a beaucoup évolué en faveur des énergies propres sous l’effet des progrès technologiques et des conditions du marché. Même en l’absence d’une tarification carbone autre que ponctuelle ou insuffisante, les investissements globaux en centrales électriques à base de sources renouvelables dépassent, de loin, celles à base de sources fossiles. Le coût du solaire continue de chuter, à tel point que dans un grand nombre de pays, le charbon n’est plus compétitif.
Lueur d’espoir que l’on retrouve aussi du côté des acteurs non-étatiques : nombre de grandes entreprises, de villes et de collectivités locales s’engagent de plus en plus sans attendre les gouvernements. Une centaine de mégacités de tous les continents collaborent au sein de l’organisation « C40 ». Ces très grandes villes s’engagent à se mettre sur une trajectoire correspondant aux objectifs de l’Accord de Paris. Le groupe « We are still in » (nous sommes toujours impliqués) s’est formé en 2017 en réaction à l’intention du président Trump d’abandonner l’Accord de Paris. Cette alliance comprend plus de deux mille entreprises et presque trois cents villes américaines. Ses membres ont pour but de faire respecter les engagements des États-Unis sur l’Accord de Paris par leurs propres actions.
Plusieurs grandes entreprises ont pris, bon gré mal gré, le tournant. Il est vrai que leurs publics, c’est-à-dire leurs consommateurs, les y inciteraient tôt ou tard. C’est le cas de grandes multinationales comme Microsoft, Apple, Starbucks, Unilever, etc ; sans compter toutes les sociétés qui misent aujourd’hui sur la stratégie verte qu’elle soit sincère ou soumise aux mutations du marché. Il suffit de regarder aujourd’hui un écran de publicité à la télévision pour constater le nombre impressionnant de marques qui ont adopté un discours « vert ». Greenwashing peut-être mais, au stade où nous en sommes, tout est bon à prendre.
Il faut dire que la pression de la société civile ne cesse de s’accroître. L’urgence climatique est dans tous les esprits et chacun s’inquiète à sa manière du niveau des canicules, de la qualité de l’air que l’on respire ou des aliments dont on se nourrit. Chacun comprend plus ou moins confusément que les dix ou quinze années qui sont devant nous sont celles de la dernière chance. Durant ce laps de temps, il faudra revoir tous nos comportements mais aussi nos infrastructures et nos modes de déplacements.
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Les mentalités changent et c’est ce qui peut changer le monde. Pour s’en persuader il suffit de regarder ces cinq minutes d’extraits d’une émission de télévision de 1979.
L’émission réunissait quelques grands « explorateurs » comme Haroun Tazieff ou le Commandant Cousteau. Ils débattaient pour la première fois de ce qui est aujourd’hui, malheureusement, notre quotidien. Voyez comme les temps peuvent changer.
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