Macron et le climat : 3,3 sur 10, selon la Convention citoyenne
Avant l’analyse de ce projet de loi, il est intéressant de revenir sur ce mot : résilience. On va l’utiliser souvent, comme on se doit d’utiliser les mots « énergie verte, transition énergétique, présentiel, distanciel, virus, confinement, létal … » Ce sont des mots utilisés dans le langage capitaliste. Que signifie vraiment « résilience » ? « La capacité d’un écosystème, d’un biotope ou d’un groupe d’individus (population, espèce) à se rétablir après une perturbation extérieure (incendie, tempête, défrichement, etc.). »
En fait, ce pouvoir en place veut reculer pour mieux rebondir et imposer son système. Le projet de loi est une escroquerie macronienne puisqu’il fait semblant de s’attaquer aux véritables problèmes.
110 organisations ne sont d’ailleurs pas gênées pour le dire en terme diplomatique : « L’étude d’impact accompagnant le projet de loi tiré de la Convention Citoyenne reconnaît ainsi que les mesures proposées ne permettront pas, en l’état, de tenir les objectifs de baisse d’émissions de 40 % à horizon 2030. Et ce, alors que cette cible est déjà en elle-même insuffisante compte tenu du nouvel objectif de -55 % adopté en décembre dernier à l’échelle de l’Europe. »
D’ailleurs, la Convention climat juge sévèrement la prise en compte de ses propositions par le gouvernement.
Même le Conseil Économique, Social et Environnemental (CESE) et le Conseil National de la Transition Écologique (CNTE) s’inquiètent de l’insuffisance des mesures prises pour atteindre les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre, mais aussi de la faiblesse des dispositifs pour réduire les inégalités sociales. Le CESE indique ainsi que « les nombreuses mesures du projet de loi, en général pertinentes restent souvent limitées, différées ou soumises à des conditions telles que leur mise en œuvre à terme rapproché est incertaine ». Le CNTE est sur la même base.
Ne parlons pas de la 5G dans ce projet de loi : c’est totalement et normalement oublié ! Macron l’a déjà oublié à la fin de la convention climat !
Il faut rappeler que la 5G occasionera une augmentation de 30 % des gaz à effet de serre. Dans quelques années, tout le secteur informatique sera aussi polluant que le parc automobile mondial. Et on ne fait rien pour l’en empêcher… bien au contraire !
Cela s’appelle le progrès ? C’est peut-être un progrès technologique, ce n’est sûrement pas un progrès humain. C’est même une régression dans ce domaine puisque, de plus en plus, on va faire appel aux robots pour remplacer les hommes.
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Les 150 membres de la Convention citoyenne pour le climat se sont retrouvés ce week-end en visioconférence pour évaluer les réponses apportées par le gouvernement à leurs propositions. Le projet de loi climat autant que l’attitude déloyale du Président de la République ont été décriés. Les citoyens ont administré un véritable camouflet au gouvernement.
Leur ressentiment ne faisait plus aucun doute. Après des mois à subir,
le sabotage de leurs propositions par le gouvernement, les membres de la Convention citoyenne pour le climat ont enfin pu lui répondre. Lors de leur dernière et ultime session, du vendredi 26 février au dimanche 28, le sentiment de trahison était palpable, la colère débordante. Invités à se prononcer sur la manière dont le chef de l’État avait repris ou non leurs mesures, les citoyens lui ont envoyé un verdict aussi cinglant qu’une gifle.
Réunis en visioconférence pendant trois jours, les citoyens ont pris successivement la parole derrière leurs écrans respectifs. L’âpreté du dispositif numérique n’a pas atténué leur détermination. Dès vendredi matin, ils ont commencé à tirer à boulets rouges sur l’exécutif. « Nos mesures ont été transformées en mesurettes », s’est ainsi plainte Brigitte. « On est venu nous chercher pour faire un travail mais finalement, nos avis, ils n’en tiennent pas compte », a regretté Benoît. Thierry, lui, a dénoncé « une fumisterie », « le gouvernement nous a méprisés » . « On a été pigeonné », a ajouté Nicolas. « On s’est servi de nous comme d’un mouchoir de poche », a poursuivi Nadine.
Tous ont en ligne de mire
le manque d’ambition du projet de loi Climat qui sera débattu à l’Assemblée nationale en mars.
« Il y a tromperie sur le produit et je pèse mes mots », a déclaré Claude. « On est écœuré, c’est riquiqui ce qu’il contient par rapport à ce que l’on avait proposé », a enchaîné Yolande. « Il ne s’agit pas d’être pessimiste ou optimiste mais d’être réaliste », a continué Jean-Pierre. « Je constate le peu d’exigence du gouvernement envers lui-même. Il n’est pas à la hauteur de ses propres objectifs. Son projet de loi trompera sûrement une partie de la population mais il ne trompera pas le climat ».
Vendredi, les citoyens ont joué au « jeu des 146 différences » en comparant leurs propositions à celles, édulcorées, du gouvernement. Après un examen détaillé de plusieurs heures, ils ont pu constater que toutes les mesures significatives avaient été abandonnées ou revues à la baisse. « Le manque de loyauté » du président de la République a été pointé du doigt. Il avait pourtant promis de transmettre « sans filtre » les propositions des citoyens soit au Parlement soit par référendum.
« Notre travail a accouché d’une souris et on ne peut pas s’en contenter, a estimé Pierre. Tout retard pris sur nos engagements nous précipite vers l’emballement climatique et la fin de l’humanité. C’est criminel. Il n’y a pas de compromis possible ».
« Ce n’est pas une condamnation mais une demande de sursaut »
Dimanche, les citoyens étaient invités à une série de votes pour évaluer précisément comment les mesures de la Convention avaient été prises en compte par le gouvernement. Le scrutin s’est métamorphosé en un vote sanction. Sur les six grands thèmes « consommer », « se nourrir », « se loger », « se déplacer », « produire et travailler », le gouvernement n’a jamais obtenu la moyenne. Ses notes ont tourné autour de 3/10.
La traduction des objectifs emblématiques de la Convention a été durement jugée : « Limiter les effets néfastes du transport aérien » a obtenu 2,8 de moyenne. Pour rappel, le gouvernement souhaite interdire les vols aériens si une alternative en train existe en moins de deux heures trente. La Convention proposait quatre heures.
« L’introduction dans le droit d’un délit d’écocide », largement remanié ( et atténué) par l’exécutif a obtenu une note de 2,7/10, la régulation de la publicité 2,6. L’objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre sur les autoroutes et les voies rapides 2,5. Dès juin dernier, Emmanuel Macron avait abandonné la proposition phare de la Convention qui voulait limiter la vitesse sur les autoroutes à 110 kilomètres/ heure.
Une vingtaine de citoyens ont systématiquement voté zéro. Ils y ont vu le dernier outil à leur disposition pour enjoindre les parlementaires et le gouvernement à être plus ambitieux. « Ce n’est pas une condamnation mais une demande de sursaut », considère Hubert. Il n’empêche qu’ avec ces résultats, le gouvernement est renvoyé à l’image d’un cancre en matière d’écologie. « Il pourra toujours se rattraper à l’oral avec les amendements », s’est amusée Évelyne lors du débat. Après avoir infantilisé les Français tout au long de son quinquennat, Emmanuel Macron a été remis à sa place par de simples citoyens tirés au sort.
« Pourquoi on laisse les gros industriels faire la loi ? »
À la question générale : « Quelle est votre appréciation de la prise en compte par le gouvernement des propositions de la Convention citoyenne ? », les citoyens ont encore une fois sorti le stylo rouge et donné une note moyenne de 3,3/10. À la seconde question qui se demandait si les décisions du gouvernement permettaient « de s’approcher de l’objectif de diminution d’au moins 40 % des émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030 », les membres ont répondu plus sévèrement : 2,5/10 seulement.
Au cœur de leurs discours, les membres de la Convention ont aussi insisté sur le travail de sape des lobbies. Ils ont vécu, en accéléré, la violence de la Ve République gangrenée par les groupes d’intérêts. Ils se sont heurtés au plafond de verre de l’oligarchie et en ont fait l’amère expérience. « Le Medef et les cabinets d’audit nous ont planté un coup de poignard dans le dos », a jugé avec le recul Sylvain. « Pourquoi on laisse les gros industriels faire la loi ? s’est demandé Grégory. Moi je suis électricien. Si je fous le feu à votre maison, vous me virez, alors pourquoi on ne fait pas pareil ? C’est gens là sont des criminels. Ils détruisent notre avenir à tous ».
Selon Samyr, la Convention citoyenne devait permettre une nouvelle approche. Mais sa conclusion en demi-teinte est « révélatrice de la crise démocratique » . « Le filtre de l’argent a triomphé », pour Murielle. « C’est un mauvais signal qui risque encore de nourrir la défiance vis-à-vis de la politique », s’est inquiété Mickaël.
À l’avenir, les Conventionnels souhaiteraient reproduire l’expérience mais voudraient que celle-ci soit mieux définie juridiquement pour éviter les déconvenues. D’ici là, ils vantent, tous, la métamorphose individuelle qu’ils ont vécue pendant ces dix-huit mois. « Une expérience riche qui change la vie » : « Je ne sais pas vous, mais moi maintenant je lis des projets de loi au petit déjeuner le dimanche matin », a raconté, souriante, Mélanie. Elle est aussi devenue maire de son petit village dans la Sarthe.
La dernière session se finissant, les membres de la Convention ne semblent pas vouloir se quitter. « On est tous devenus des soldats en lutte contre le réchauffement climatique » a expliqué Pierre. Pour Claire, c’est déjà ça. « Aujourd’hui, il y a 150 Français en colère qui sont devenus militants pour le climat. Emmanuel Macron a fabriqué 150 citoyens qui ne vont pas voter pour lui en 2022 ».
reporterre.net
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La Convention climat juge sévèrement la prise en compte de ses propositions par le gouvernement
Le gouvernement n’a jamais obtenu la moyenne lors d’une série de votes sur les six grands thèmes de mesures proposées (« se loger », « se nourrir », « se déplacer »…).
La Convention citoyenne pour le climat (CCC) a jugé sévèrement dimanche la « prise en compte » de ses propositions par le gouvernement, prise en compte qui n’a jamais obtenu la moyenne lors d’une série de votes sur les six grands thèmes de mesures.
La thématique « se loger » a obtenu une moyenne de 3,4 sur 10, « produire et travailler », « se nourrir » et « se déplacer » 3,7 chacune, consommer 4, et les propositions sur la gouvernance 4,1, dans une série de votes organisés lors de la dernière session de cette convention, exercice de démocratie participative inédite en France.
Sur les 150 « citoyens » initialement tirés au sort, 119 étaient inscrits pour ce vote final, lors d’une session tenue par visioconférence, crise sanitaire oblige.
Peu de mesures ont obtenu la moyenne. La réforme de l’article 1er de la Constitution pour y introduire la lutte contre le changement climatique par exemple a recueilli la note de 6,1.
Mais la traduction d’autres objectifs emblématiques de la CCC a été durement jugée: « limiter les effets néfastes du transport aérien » a obtenu 2,8 de moyenne, ou l’introduction dans le droit d’un délit « d’écocide », amoindri par rapport à la proposition de la Convention, avec une note de 2,7.
Les membres de la Convention doivent encore voter pour répondre dans l’après-midi à quatre questions plus générales, tirant le bilan global de l’exercice.
Emmanuel Macron avait décidé de créer la CCC au sortir de la crise des Gilets jaunes, née d’une taxe carbone sur les carburants perçue comme injuste. Sa mission: proposer des mesures permettant de « diminuer d’au moins 40% (par rapport à 1990) les émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030 dans un esprit de justice sociale ».
Démarrée en octobre 2019, la CCC a remis en juin, au terme d’un calendrier bouleversé par le Covid, 149 propositions au président de la République, qui en a rejeté trois et s’était engagé à transmettre les autres « sans filtre ».
Le gouvernement comptabilise 75 mesures mises en oeuvre et 71 en voie de l’être. Certaines ont trouvé place dans le plan de relance ou le budget, d’autres dans des décrets et une quarantaine dans le projet de loi Climat et résilience, qui sera débattu à l’Assemblée fin mars.
afp