… avec le nouveau ministre de la justice
La nomination de Gérald Darmanin comme garde des Sceaux, conjuguée à la reconduction de Bruno Retailleau comme ministre de l’Intérieur, est le signe d’un alignement à venir des feuilles de route de ces deux ministères régaliens, sur le fond comme sur la forme. Elle fait craindre un nouveau recul du respect de l’État de droit comme de l’indépendance de la Justice.
La nomination de Gérald Darmanin comme garde des Sceaux, conjuguée à la reconduction de Bruno Retailleau comme ministre de l’Intérieur, est le signe d’un alignement à venir des feuilles de route de ces deux ministères régaliens, sur le fond comme sur la forme. Elle fait craindre un nouveau recul du respect de l’État de droit comme de l’indépendance de la Justice – recul auquel Gérald Darmanin a déjà largement contribué.
En tant que ministre de l’Intérieur, il a régulièrement mis en concurrence le respect des procédures et l’intérêt de l’État, laissant entendre que le droit était plus une entrave à l’action de l’exécutif, qu’un prérequis au service de la protection et de l’égalité de traitement des citoyens. Artisan de réformes catastrophiques pour la justice et son efficacité, il a par ailleurs mené des politiques de maintien de l’ordre qui ont durablement porté atteinte aux libertés publiques. Mais il a aussi démontré à maintes reprises qu’il n’avait cure de l’indépendance de la justice.
L’autorité judiciaire est chargée, par la voix de ses procureurs et de ses juges, de faire respecter le droit et réprimer les atteintes à la loi, tout en protégeant les libertés individuelles contre les abus et en contrôlant l’action des forces de l’ordre. Indépendante, séparée des pouvoirs exécutif et législatif, elle constitue un contre-pouvoir aux deux autres, sans lequel il n’y a pas d’équilibre démocratique.
Or, Gérald Darmanin n’a pas hésité à critiquer les décisions de justice qui lui déplaisaient ou à mettre en doute l’appréciation des juges, leur compétence, voire leur légitimité dans des affaires individuelles. Alors qu’il a également pu invoquer la politisation des magistrats pour discréditer leur travail, il devra dorénavant nommer et sanctionner les procureurs ainsi que leur demander de mettre en œuvre la politique pénale du pays.
Après l’avoir si souvent entendu prendre le parti de la police contre la justice, comment croire à sa volonté affichée de défendre l’institution judiciaire et de protéger sa mission constitutionnelle ? Les magistrates et les magistrats ne peuvent qu’être extrêmement inquiets de le voir, encore tout imprégné de la place Beauvau, arriver place Vendôme.
Syndicat de magistrature sur le blog de mediapart