A69 : Une victoire historique !

Arrêt des travaux entre Castres et Toulouse

L’audience du Tribunal administratif qui s’est tenue à Toulouse mardi 18 février dernier ne laissait que peu de doutes sur l’issue des débats. La rapporteure publique introduisant les débats n’a pas eu de mots assez durs contre la raison impérative d’intérêt public majeur (RIIPM) accordée au projet d’autoroute A69 reliant Toulouse à Castres. Cette RIIPM permettait au concessionnaire de se soustraire aux obligations de préserver les espèces protégées.

Par un jugement daté du 27 février 2025, le juge administratif en a décidé autrement en donnant raison aux 14 co-requérants, dont Agir pour l’environnement. Cette décision historique stoppe les travaux de ce grand projet inutile et imposé.

Cette victoire, nous la devons aux opposants locaux qui ont eu l’intelligence de varier les plaisirs, alternant procédures judiciaires et actions non-violentes, agrégeant des paysans, des écologistes, des juristes et une poignée de parlementaires dont nous devons saluer l’opiniâtreté.

Cette lutte exemplaire est inspirante à plus d’un titre et rejoint ainsi la longue liste des victoires écologiques, du Larzac à Superphenix, en passant par l’aéroport de Notre-Dame des Landes, Sivens et bien d’autres encore !

Malgré un climat de régressions généralisées en matière écologique, le combat victorieux contre l’A69 nous redonne de l’espoir. En alliant détermination, créativité et non-violence, nous sommes en mesure d’être le grain de sable stoppant les pulsions destructrices des apôtres d’un productivisme finissant.

Ensemble, nous faisons la différence !

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A69 : la justice met un coup d’arrêt au chantier

Le tribunal administratif de Toulouse a mis un coup d’arrêt jeudi à l’imposant chantier de l’A69 en annulant l’arrêté préfectoral qui l’autorisait, une première pour une infrastructure routière de cette envergure en France, signant un revers pour l’Etat.

« L’arrêté du 1er mars 2023 par lequel les préfets de la Haute-Garonne et du Tarn ont délivré à la société Atosca une autorisation […] en vue de la réalisation des travaux de la liaison autoroutière entre Verfeil et Castres, dite A69 » est « annulé », selon la décision du tribunal consultée par l’AFP.

L’État va faire appel de la suspension du chantier, qu’engendre automatiquement la décision du tribunal, a annoncé le ministère des transports. Le ministre Philippe Tabarot a qualifié la situation d’« ubuesque : un chantier avancé aux deux tiers est arrêté du jour au lendemain », selon un communiqué.

Pour sa part, le collectif d’opposants à l’A69 La Voie est libre (LVEL) a immédiatement salué « une décision historique qui porte un coup d’arrêt définitif à un projet inutile, destructeur et irresponsable, que nous dénonçons avec force depuis plusieurs années. C’est un grand jour pour le droit environnemental ».

L’arrêt du tribunal « dénonce l’irresponsabilité de l’Etat et du concessionnaire pour avoir engagé les travaux sans attendre. Ce passage en force, dopé au déni institutionnel, vient d’être stoppé net », s’est encore réjoui LVEL.

Pour ses promoteurs, cet axe visait surtout à désenclaver « le bassin de vie » du sud du Tarn, qui « a besoin de se connecter aux équipements de la capitale régionale » Toulouse, comme l’aéroport ou les hôpitaux, selon Yasser Abdoulhoussen, directeur de projet, chargé du pilotage de l’A69 à la préfecture du Tarn.

Cette décision va « priver d’emploi des milliers de personnes, paralyser l’économie du sud du Tarn et, plus largement, tous les grands projets d’infrastructures en France », a aussitôt regretté, dans un communiqué, l’ancien député du Tarn Bernard Carayon, maire de Lavaur, dont la commune longeait le tracé.

Engins rangés

Cette décision signifie l’arrêt immédiat du chantier, car un appel devant la justice administrative n’est pas suspensif.

Avant même la décision, sur le chantier côté castrais de l’autoroute de 53 km qui devait relier Toulouse à Castres fin 2025, les engins étaient rangés à la mi-journée, contrairement à l’habitude, a constaté un journaliste de l’AFP, qui a vu une petite pelleteuse en train d’être hissée sur un camion, à quelques dizaines de mètres du site où des « écureuils » occupent encore un arbre marqué pour être abattu.

Le tribunal a suivi l’avis de la rapporteure publique, qui avait par deux fois demandé au tribunal administratif de Toulouse « l’annulation totale » de l’arrêté préfectoral qui a permis d’entamer le chantier en 2023.

A l’audience du 18 février, cette magistrate, Mona Rousseau, avait réaffirmé que les gains espérés de la future autoroute n’étaient pas suffisants pour établir une « raison impérative d’intérêt public majeur » justifiant les atteintes à l’environnement commises par le projet.

« Dans tout l’historique de la jurisprudence sur les autoroutes en France, aucun projet autoroutier n’a été annulé pour des raisons environnementales », avait déclaré à l’AFP Julien Bétaille, maître de conférences en droit de l’environnement à l’université Toulouse Capitole.

Cette annulation visant pour la première fois une autoroute signifie qu’« un verrou a sauté dans la mentalité du juge administratif », a-t-il dit avant la décision du tribunal administratif.

Une première

De fait, c’est la première fois en France qu’une infrastructure routière d’une telle importance est interrompue par un jugement, et non par une décision politique, comme l’abandon du projet d’A45 Lyon/Saint-Étienne en 2018.

Le cas du contournement du village touristique de Beynac, en Dordogne, retoqué par la justice administrative, concerne un ouvrage de moindre envergure, avec un budget initial plus de dix fois inférieur aux 450 millions d’euros que doit coûter l’A69.

Le bitume n’avait pas encore été coulé mais Atosca, constructeur et futur concessionnaire de l’autoroute, affirmait avoir déjà « concrétisé plus de 300 millions d’euros, soit 65% du budget total du chantier ».

« Cette décision est incompréhensible, a estimé le député du Tarn Jean Terlier, dans un communiqué. Comment accepter que les juges n’aient pas pris en compte la situation du chantier avec près de 300 millions d’euros de travaux déjà engagés, 45 % des terrassements réalisés, 70 % des ouvrages d’art construits et plus de 1 000 salariés du concessionnaire qui se retrouveront demain sans emploi ».

Trouvé sur Mediapart … mais c’est un communiqué de l’AFP !

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Trois articles dans Mediapart le 28 février

A69 à l’arrêt : à Toulouse, les opposants savourent la victoire en attendant la suite

A69 : l’État s’acharne et se fourvoie dans le déni climatique

Dossier Autoroute A69 : une lutte sans concession

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« Une décision historique ! » : l’A69 annulée, les opposants exultent

Le 27 février, le tribunal administratif de Toulouse a annulé l’autorisation environnementale de l’autoroute A69. À Toulouse, les opposants célèbrent leur victoire, deux ans après le début du chantier.

Toulouse, correspondance

« En dépit de la pression exercée par l’État et le concessionnaire, c’est une décision historique ! » Le 27 février, le tribunal administratif de Toulouse a annulé l’autorisation environnementale délivrée au concessionnaire Atosca, qui lui permettait de construire l’autoroute A69 entre Toulouse et Castres. Après deux ans de travaux, le chantier est stoppé.

« C’est la première fois qu’une autoroute est annulée pour des raisons environnementales, alors même que les travaux sont très avancés », a déclaré en conférence de presse à Toulouse Maître Alice Terrasse, avocate d’une partie des associations ayant déposé la requête pour annuler l’A69.

« C’est un moment inoubliable pour nous, dit Gilles Garric, militant du collectif La Voie est libre. Cela fait plus de quinze ans qu’on lutte contre ce projet. Aujourd’hui, le tribunal nous a donné raison sur tous les arguments que nous avons toujours portés. »

L’État ne compte pourtant pas en rester là. Le ministre des Transports, Philippe Tabarot, a qualifié cette annulation d’« ubuesque » et a annoncé que l’État ferait appel de cette décision. Ce recours serait assorti d’un sursis à exécution qui, s’il est accepté par le juge, pourrait permettre au concessionnaire de poursuivre les travaux jusqu’à la prochaine audience à la cour administrative d’appel prévue d’ici au moins un an. Un scénario très peu probable, selon l’avocate Alice Terrasse.

Des bénéfices « trop limités »

Dans son jugement du 27 février, que Reporterre a pu consulter, le tribunal administratif de Toulouse estime que les « bénéfices économiques, sociaux et de sécurité publique sont trop limités » pour justifier la construction de l’autoroute.

La juridiction démonte les arguments du concessionnaire et de l’État, estimant, par exemple, que le bassin Castres-Mazamet ne souffre pas d’une situation de décrochage par rapport à d’autres villes de la région comme Albi ou Carcassonne. Il estime que la route nationale existante n’est pas particulièrement accidentogène comparée à d’autres itinéraires, et souligne que « le coût élevé du péage de la future liaison autoroutière » (6,77 euros pour un aller simple) pourrait décourager de nombreux utilisateurs.

Le tribunal conclut qu’« au vu des bénéfices très limités qu’auront ces projets pour le territoire et ses habitants, il n’est pas possible de déroger aux règles de protection de l’environnement et des espèces protégées ».

En plus d’annuler l’autorisation de l’A69, la juridiction a également annulé l’autorisation de l’A680, une jonction de 8 kilomètres censée relier l’agglomération toulousaine à la commune de Verfeil, où se trouve l’échangeur pour emprunter l’A69. L’arrêt du chantier suspend également l’installation très controversée des usines à bitume, qui devait intervenir mi-mars.

« Je tiens à saluer le courage de la juridiction administrative. Le tribunal a jugé en droit et uniquement en droit, et cela est de très bon augure pour la suite », souligne l’avocate Alice Terrasse.

« Pour tous ceux qui ont laissé des plumes »

Depuis plusieurs mois, l’étau juridique s’était resserré autour de ce projet autoroutier controversé. Durant deux audiences au tribunal, la rapporteuse publique, Mona Rousseau, avait demandé aux juges d’annuler l’autorisation environnementale.

Dans ses conclusions, qu’elle avait réitérées lors de l’audience du 18 février, la magistrate indépendante avait jugé qu’il n’existait pas de raison impérative d’intérêt public majeur et que les gains espérés par la construction de cette autoroute n’étaient pas suffisants par rapport aux atteintes à l’environnement.

Pour les militants, trop de temps a été perdu. « Il n’est pas normal d’avoir un jugement deux ans après le début des travaux, dit Thomas Digard, un militant du collectif La Voie est libre. J’ai une pensée émue pour les nombreuses personnes expropriées pour ce projet inutile et finalement jugé illégal. »

« On demande l’amnistie pour tout le monde, puisque l’histoire leur donne raison ! »

À ses côtés, dans un petit bar de Toulouse choisi pour accueillir la conférence de presse, Geoffrey Tarroux, un autre membre du collectif, a salué « tous ceux qui ont laissé des plumes lors de cette lutte, qui ont sacrifié leur vie et ont laissé des vertèbres et des fémurs durant deux ans. De nombreux procès doivent encore avoir lieu contre des opposants à l’A69, et on demande l’amnistie pour tout le monde, puisque l’histoire leur donne raison ! »

Les modalités concrètes de cette annulation, concernant la remise en état du chantier ou la déconstruction des ouvrages d’art, ne sont pas encore connues. Pour Jean Olivier, coprésident des Amis de la Terre Midi-Pyrénées, « le plus important pour le moment, c’est de laisser la nature reprendre ses droits ».

reporterre

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