Des pièges « cruels » à oiseaux bientôt légalisés

La Ligue de protection des oiseaux (LPO) tire la sonnette d’alarme. 

Le Ministère de la transition écologique et solidaire, sous la tutelle de Nicolas Hulot, entend inscrire dans la loi diverses techniques de chasse aux oiseaux sauvages jugées cruelles. Alors que les experts observent un recul dramatique des populations d’oiseaux en Europe, le projet inquiète davantage les experts. Les citoyens sont appelés à se prononcer sur le sujet dans le cadre d’une consultation.

Les oiseaux, comme les abeilles, sont des indicateurs importants de la biodiversité. Selon une étude publiée dans le journal scientifique Ecology Letters, l’Europe a perdu plus de 400 millions d’oiseaux en 30 ans. Si les causes de ce recul de la biodiversité sont nombreuses, dont l’augmentation du nombre de chats, la disparition progressive des zones humides ou encore la généralisation de l’agriculture intensive, la situation des oiseaux sauvages européens n’est pas enviable, à l’exception de quelques espèces invasives. Une certitude : la faune ornithologique européenne souffre du développement humain.

Mais une autre menace pèse sur ces animaux. Au nom de « la tradition », le Ministère de la transition écologique et solidaire souhaite, une fois encore, autoriser diverses pratiques de piégeage des oiseaux. Des techniques de capture qui, en plus d’être cruelles, sont le plus souvent non-sélectives, engendrant, comme pour la pèche, le risque de prises accessoires. Selon la Ligue de protection des oiseaux, plusieurs milliers d’oiseaux seraient concernés. Rien qu’en ce qui concerne les alouettes des champs, le quota de chasse fixé par le ministère porte sur 370.000 têtes. Près du double des captures réalisées par les chasseurs l’année dernière. Élément qui ne manquera pas d’étonner, la plupart de ces techniques sont pourtant interdites par l’Union européenne. Mais la France peut, si elle le souhaite, bénéficier d’une exception « culturelle » pour certains de ses départements.

La LPO détaille ces techniques de capture particulièrement stressantes et violentes. On trouve notamment la chasse à glu qui consiste à enduire d’une colle forte des bâtons cachés dans un arbre. Les grives et autres merles noirs capturés serviront in fine d’appelants pour la chasse à tir d’autres oiseaux plus volumineux. Les trois projets d’autorisation entendent également permettre la chasse aux pantes (filets horizontaux déclenchés manuellement) et à la matole (petites cages à déclenchement automatique disposées au sol). Une technique qu’on retrouve également dans le braconnage des ortolans et des pinsons. Viens enfin la plus cruelle d’entre elles : la chasse tenderie au brancher. Les oiseaux sont appâtés à l’aide de baies sauvages dans un système les obligeants à passer la tête dans un collet en crin de cheval. Quand l’animal veut prendre son envol, il s’y étrangle dans la panique…

Pour les défenseurs des oiseaux, l’argument de la tradition ne tient pas la route. En effet, les dérogations permises par l’Europe concernent des pratiques datant d’une époque révolue où les populations rurales devaient parfois chasser des oiseaux pour pouvoir se nourrir. Aujourd’hui, cette excuse est caduque, autant par l’abondance de nourriture que par la crise écologique et le bon sens commun. Mais les chasseurs ne l’entendent pas de cette oreille et sont nombreux à perpétuer cette chasse dans l’indifférence des autorités. En 2015, cette réalité fut portée à la connaissance du grand public à travers l’agression d’Allain Bougrain-Dubourg et d’une équipe de France 2 par une famille de chasseurs.

Le président de la LPO avait osé exposer cette réalité ignorée des autorités. Et c’est tout le problème. Le piégeage est difficilement contrôlable par les forces de l’ordre. La légalisation de ces techniques est une porte grande ouverte au braconnage d’espèces dont le commerce est juteux mais strictement interdit en plus d’être une menace pour la biodiversité. « Lorsque la police de la nature arrive sur place, si jamais elle arrive, il est souvent trop tard. Et quand bien même, lorsqu’un pinson ou un chardonneret est pris et que le garde arrive, le piégeur a beau jeu de dire qu’il allait le relâcher. » communique la LPO, précisant qu’il est courant que les oiseaux soient blessés ou même tués par ces pièges. L’excuse de l’exception culturelle chercherait-t-elle à couvrir un business illégal ?

31 juillet 2018 ; https://mrmondialisation.org/